Interview de la compagnie Arthur Harel et (LA) HORDE Marine Brutti, Jonathan Debrouwer, Arthur Harel, Céline Signoret.

La compagnie Arthur Harel s'associe depuis maintenant deux ans à (LA)HORDE. A l'occasion de leur dernière création ALL ALONG FAR AWAY, Mouvance d'Arts/Entrez dans la danse les a rencontré.

Qu'est-ce qui a motivé l'écriture de cette pièce All Along Far Away ?
A.H : L'écriture de cette pièce a commencé à la suite d'une résidence de cinq mois au Vent se lève à Paris avec Marine Brutti et Jonathan Debrouwer, artistes et Céline Signoret, danseuse qui suivait la direction musicale et la chorégraphie avec moi. 

M.B: C'était une période de création intense car il était question de présenter chaque mois au public un laboratoire chorégraphique réalisé en deux jours avec cinq à huit danseurs... Les propositions pouvaient être testées en direct sur le plateau et ce format de création nous a permis de développer un langage entre la vidéo, les mots et les danseurs. Mais il nous a aussi donné envie de prendre plus de temps pour pouvoir créer une pièce chorégraphique plus structurée. 

J.D: C'est à ce moment là que nous avons entamé une résidence pour écrire une nouvelle pièce, All Along Far Away, à la Halle aux Cuirs de la Villette (Paris) . Nous avons pu continuer à construire la pièce au Centre National de la Danse (Pantin) puis au Théâtre le Colombier (Bagnolet).

Comment avez vous recruté/choisi vos interprètes ? Quelles critères sont importants pour un chorégraphe émergent ?
A.H: Certains interprètes ont suivi le processus de création entrepris durant les laboratoires chorégraphiques, nous avions donc envie de poursuivre ce travail avec eux. Pour d'autres cela va de l'audition à l'invitation à venir travailler directement avec l'équipe en studio pour voir ce qu'il se passe. Former une équipe artistique pour une création ne relève d'aucune recette à mon sens. Très intuitivement, au plateau les choses se sont décidées naturellement. 

C.S: Dans notre travail, nous mettons un point d'honneur à rencontrer d'abord des personnes avant de rencontrer des danseurs. Ce qui nous attire, c'est l'expérience qui transparait dans le mouvement de chacun. Dans ma collaboration avec Arthur, je cherche toujours d'abord à comprendre ce qu'il veux faire ressortir chez chacun de ses interprètes puis je l'interroge sur comment les intégrer à l'écriture. À notre sens, impliquer les danseurs dans le processus de création nous semble essentiel.

Quel est le rôle ou la symbolique du seul élément de décor,  ainsi que de la découpe faite au sol qui nous apparaît à la fin de la pièce ?
M.B: Notre plateau est vide la plupart du temps, et cette structure n'est pas un décors mais apparaït ponctuellement pour contrebalancer cette illusion de plateau vierge et signifier que nous sommes dans un espace neutre, certes, mais pas inexploré et qui a déjà été "habité". En effet, un théâtre, une scène, sont chargés de tout ce qui s'y est joué auparavant et offrent une fenêtre très particulière sur les actions qui s'y déroulent. 
La forme a priori fonctionnelle de notre structure permet de se projeter encore plus dans l'idée qu'elle signifie un lieu/un espace. Ses apparitions très ponctuelles à des étapes différentes de sa déconstruction créaient une image subliminale, un lieu parallèle qui reste dans l'esprit du spectateur et avec lequel les danseurs n’interagissent jamais. 

J.D: Pour la découpe, c'est un peu le même principe, c'est un élément qui était présent sur le plateau tout le long de la pièce et qui n'est révélé qu'à la fin du spectacle, il vient offrir l'idée que d'autres couches de réalité existent et ont existé dans ce lieu. Cet entre-deux peut devenir un lieu où le temps reste figé, à l'image de notre personnage du marcheur, qui reste bloqué dans cet espace.

Quel message souhaitez-vous communiquer au public ?
(LA)HORDE:

Aujourd'hui les messages sont devenus trop clairs et trop impactant. Avec des créations comme ALL ALONG FAR AWAY, nous cherchons à offrir un espace de réflexion différent au spectateur. Le théâtre est un lieu libre où le spectateur décide de ce qu'il va suivre, de quel moment il va regarder et quelle histoire il va se raconter.  

Crédit Cie Arthur Harel
Dans ALL ALONG FAR AWAY,  il est question d’un espace au-delà, plus ultra, d’un «pôle» aux confins de toute civilisation. Le plateau est tel une terre vierge, in-conquise, soustraite à l’empire des systèmes. Des Hommes ont dérivé là (fuyants ?), mus par quelque obscur magnétisme. Ils convergent, se frôlent, se cherchent, se heurtent, se rencontrent, tâtonnent. Agités par un vent de liberté qui désempare autant qu’il exalte, ils naviguent à vue longeant les côtes de nouvelles utopies. L’espace s’en trouve progressivement transformé. Mirage ou réalité ? Était-ce bien ce qu’ils essayaient d’accomplir, ce pour quoi ils étaient venus ?
Se dessine alors un ailleurs, de nouveau... 

Quels sont les projets à venir de la compagnie ? Votre actualité ?
(LA)HORDE:

La construction de notre prochaine création débutera dès janvier 2014 à la MPAA (Paris). Nous allons explorer le thème de l’hétérotopie. Selon la définition de Michel Foucault : "L’Hétérotopie prend place dans des lieux réels, des lieux effectifs, des lieux qui sont dessinés dans l’institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements. Sortes d’utopies effectivement réalisées, dans lesquelles les emplacements réels que l’on peut trouver à l’intérieur de la culture sont à la fois représentés, contestés et inversés, des lieux qui sont hors de tous les lieux, bien que pourtant ils soient effectivement localisables"

Un parallèle s’est créé dans nos esprits entre ces deux termes: Séniors et Hétérotopies. De la même façon que l’hétérotopie a été expliqué plus tôt, le terme sénior est souvent défini par ses contraires. Il semble constituer pour beaucoup l’envers de situations : le contraire de junior, le contraire d’actif, de jeune actif etc. C’est une catégorie sociale qui constitue elle aussi une sorte de non lieu. Elle est définie différemment selon les contextes et il est difficile de penser qu’elle constitue un groupe homogène.

Cette nouvelle pièce ouvre donc de nouveaux horizons pour nous car nous allons essentiellement travailler avec des séniors danseurs comme non danseurs. Le but sera de créer avec leurs outils une histoire, des chemins, des images afin de servir notre objet commun : la pièce. Une rencontre aura d'ailleurs lieu le 30 novembre pour choisir les participants de cette aventure.

Nous partons cette semaine à Stuttgart en Allemagne afin de performer à l'institut Français. Nous présenterons HEREIN #2: Human Garden / Erkölnig, une nouvelle performance qui se déroulera dans le bâtiment de l'Institut Français dans le cadre de la Stuttgartnacht et des Semaines Françaises.
Nous serons également à Paris avec ALL ALONG FAR AWAY en novembre pour une série de dates à la MPAA (Paris) et au Théâtre Le Colombier (Bagnolet) avant de nous rendre au concours [Re]connaissance à l'Hexagone, scène nationale de Meylan.

Propos recueillis par Valérie Gros-Dubois.
Dernier teaser de la pièce "All Along Far Away" : http://youtu.be/3Yg05OwLCLw

Dates tournées
ALL ALONG FAR AWAY (Création 2013/2014)
Mercredi 6 novembre 2013 MPAA- Saint Germain - Paris
Jeudi 7 novembre 2013 MPAA- Saint Germain - Paris 
Mardi 12 novembre 2013 Théâtre le Colombier 
Mercredi 13 novembre 2013 Théâtre le Colombier 
Samedi 23 Novembre 2013 Hexagone Scène Nationale de Meylan 
Concours (Re)connaissance
Performances :
HEREIN #1: Human Wandering / Flat Love 
Vendredi 20 septembre 2013 Festival Jerk Off 
HEREIN #2: Human Garden / Erkölnig 
Samedi 19 octobre Institut Français de Stuttgart - Allemagne   

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